Cette chambre était si petite, j’étais enfermée dans cet endroit depuis un bon bout de temps. Je ne compte même plus combien. On m’avait emprisonnée et capturée… Au départ j’avais toujours pensée être normale, jusqu’à avoir accepté d’offrir mon corps comme hôte à un yokai. Akito n’existait plus ce qui était le plus important était cet autre qui avait pris possession de moi, Mizu… Ces gens qui me gardaient dans une petite cage ne se souciaient que de mon pouvoir et celui de l’être qui avait longtemps résidé en moi… J’avais effacée qui j’étais, m’adaptant à ce que voulait et désirait Mizu, encore aujourd’hui, alors qu’il n’est plus là, je m’adapte en fonction des désirs du clan. Mizu… ce yokai m’avait salit les mains. Je revoyais encore mes mains ensanglantées, ces cadavres autour de moi et…
Je me levais du lit, brusquement en tenant ma tête, entre mes mains crispées, sentant la sueur froide couler de mon front… Je ne voulais plus m’en rappeler ! Je ne voulais pas non plus me souvenir de cette femme qui n’était pas moi… Dans une vie antérieure d’après mon clan, j’avais été Akito Fuyumi, une déesse aux pouvoirs immenses…Mizu à cette époque était un humain, mon gardien… .
Akito était morte assassinée, il en était de même pour son gardien. Mais Mizu n’avait jamais connu la paix, il s’était réincarné plus d’une fois, il voulait accomplir un but bien sombre… Sa seconde vie a été celle d’un serpent, sa troisième celle d’un vampire, sa quatrième d’un crusnik, un buveur de sang de vampires inhumain, sa sixième d’un mage aux immenses pouvoirs et enfin sa septième d’un yokai… Mizu était maudit, condamné à errer, seul, avec sa souffrance que j’avais pu ressentir.
Dans la pénombre, j’entendis des pas et une sensation que je connaissais refit surface, l’angoisse, la peur ! Je regardais la chambre et ne voyais plus que du rouge, je mis mes mains devant mes yeux, horrifiée par les images que je voyais jusqu’à apercevoir les bouts de mes doigts teintés de cette couleur écarlate…. Paniquée je sortis du lit me dirigeant vers un coin de la pièce, en trébuchant. Le rouge je détestais cette couleur ! Je me laissais glisser contre le mur, tenant mon crane qui me faisait mal. Je ne pouvais pas m’échapper d’ici… Pas même de celui qui m‘avait fait souffrir, il se vengeait… parce que l’ancienne Akito l’avait abandonnée dans sa solitude… C’est alors que je vis dans le miroir accrochée au-dessus de ma coiffeuse, son ombre…. Il était entré je le savais. J’entendis des pas jusqu’à apercevoir l’homme aux longs cheveux noirs et aux yeux émeraude, que je reconnaissais très bien. Mes mains lâchèrent ma tête mais se crispèrent sur le mur, alors que je me faisais la plus petite possible. Je ne voulais plus être utilisée, je voulais partir loin de cet être cruel!
Il se baissa et ses yeux verts me fixèrent un moment dans l’obscurité silencieuse, de la chambre qui n’était illuminée que par les faibles rayons de lune. J’entendis alors sa voix qui brisa le silence… « Akito… » Je tentais de reprendre le contrôle de mon esprit, cachant l’effroi que je ressentais, il s’approcha et je tendis ma main devant moi pour le pousser. Il ne fallait pas qu’il s’approche… Il m’avait détruite parce qu’il ne pouvait plus aimer personne, je n’avais été qu’un jouet et j’avais commise les pires choses sous son contrôle.
Alors que j’allais ramasser ma main qui tremblait par erreur, il la tint entre les siennes « Tu es faible, ne fais pas semblant d’être forte… Je t’effraie, tout comme ce que tu veux oublier. Mais je ne te ferais pas de mal… » Il souriait et passa doucement sa main sur mon visage avant de venir caresser mes lèvres fermées, de son doigt fin… Pourquoi est-ce que je me sentais incapable de le repousser ? Son regard s’était plongé dans les miens, tentant de lire mon esprit. Il me connaissait si bien, je ne pouvais pas lui échapper. Je voyais de la tristesse, mélangée à de la colère dans ce regard si fort et dans cette voix si froide. « Ce jour là ne t’en rappelles tu pas Akito ? Cette promesse seulement entre toi et moi ?» Je ne voulais pas… Je savais qu’il parlait de cette ancienne époque, mais je n’avais pas envie de me rappeler de cette vie, Mizu n’était plus mon gardien, il avait changé et je n’étais pas cette femme… « Ce n’est pas grave Akito moi aussi j’ai oublié petit à petit… J’ai effacé l’image de cette femme, j’ai voulu la renier alors ne t’en fais pas » Il avait beau dire ça mais son sourire ne me rassurait pas ni même la proximité à laquelle se situait son visage.
Je sentis alors la brise du vent, froid et glacial, entrer dans la chambre faisant danser les rideaux blancs en face de nous. Je ne comptais plus le nombre de fois où j’étais restée seule, devant une fenêtre à regarder le ciel alors que les larmes coulaient d’elles-mêmes, mais lorsque Mizu avait été avec moi ces larmes s’étaient estompées, à cause de lui j’étais certes tombée dans les bas-fonds des enfers, mais… il était le seul à me connaitre toute entière, et à dire les mots que je désirais… Et aujourd’hui les autres mots qui ne viennent pas de sa bouche me paraissent dénués de sens, et ennuyeux. Telle une chanson que l’on a écouté des milliers de fois. Alors dans le fond peut être que je ne le haïssais pas tant que je le croyais. Peut-être serai-je un peu masochiste ?
Son visage était à quelque centimètre du miens et je semblais épuisée par ma vie, il pouvait bien faire ce qu’il souhaitait d’une fille qui n’avait jamais servie. Pour qui personne ne se souciait plus. Même me tuer pour effacer sa peine, je n’avais plus la force de me battre pour ma propre existence. Mais je savais qu’il ne me tuera pas, pas maintenant, il avait besoin de mes pouvoirs pour accomplir ce dont il souhaitait mais entre temps il allait me briser, m’amadouer avec ses mots, il lisait en moi si facilement et cette fois ci je serais son arme , je ne protesterais pas. J’étais certainement folle.
Voyant que je ne réagissais plus il avait reculé et son sourire avait disparu. Remarquant que j’étais fatiguée et faible, il me prit et partit me déposer dans le lit, je n’avais pas non plus vraiment mangé ces derniers temps. Il s’allongea et enfoui son visage contre moi et la robe blanche que je portais… Je savais qu’un lien nous réunissait mais avais-je envie de le savoir ? « Akito te souviens-tu de ce soir, où tu avais dansé dans ta longue robe blanche avec Ayame? » J’avais renoncé à l’idée de le repousser et dit doucement
« Je m’en souviens
-Je voudrais un jour moi aussi danser avec cette femme portant cette robe,j’en rêvais chaque nuits. Je suis certainement fou»
Je rougis et sentis encore une fois ce vent, j’aimais cette fraîcheur… Et si un jour je me laissais emporter par ce vent que se passera-t-il ? Peut-être que Mizu sera heureux ? Ou bien peut être me trompai je ?
« Akito cesses de penser à cela, si tu dois disparaître je le ferais avant toi… Ceci est ma dernière vie, elle sera courte et dans très peu de temps je…partirais à jamais. »
Il allait donc trouver le repos mais pourquoi , devait-il devenir encore plus inaccessible ? Comme ces nuages et ce vent ? Et quelle était cette tristesse ? Pourquoi agissait-il différemment des autres jours ? Il leva alors son visage et sur son cou j’avais remarqué que la pendule tatouée avait fait un tour, il ne restait plus qu’un seul tour et… Je ne le reverrais plus jamais. Je devrais être heureuse souhaiter sa mort mais je n’y arrivais pas, pourquoi ? Mes larmes commencèrent silencieusement à couler. Il les essuya doucement...
Alors si c’était comme ça je voulais atteindre cette lune qui lui ressemblait tant, n’émanant qu’une très discrète et infime lueur de gentillesse, même si je suis brisée, amochée et que je n’ai pas d’ailes je le rejoindrai… Dans le fond j’étais une demeurée, car je ne voulais pas me séparer de lui. Il me regarda plus sérieusement et posa ses lèvres sur mes joues où avaient séchées quelques larmes jusqu’à doucement se rapprocher des miennes, surprise et devinant ce qu’il allait faire je n’eus pas le temps de réagir qu'il m'embrassa… Je ressentais son désir et le peu de chaleur qui lui restait encore, les battements de mon cœur s’accélérèrent et il s’éloigna avant de chuchoter « Akito n’oublie pas ce jour, où mon amour débordait pour toi… Aujourd’hui ce sentiment je le ressens pour la femme que j’ai sous mes yeux. »
Son amour ? Mizu… Je ne me souvenais pas de ce jour, je ne me souvenais pas de l’expression de son visage lorsqu'il l'avait dit à l'ancienne Akito. « Entends-tu le son du vent ? Le vent efface et emporte tout sur son passage… Un jour ce sera la même chose pour toi tu m’oublieras et continueras à avancer, mais pour l’instant restons ensemble au moins cette nuit » L’oublier ? Allait-il effacer ma mémoire ? « Mizu…Ne fais pas ça ! Je ne veux pas oublier ! Peu importe si tu m’as fait tomber dans les pires pêchés je ne veux pas oublier ton visage, ta voix… Laisse-moi au moins ça de toi » Je le vis sourire et je connaissais bien ce sourire ma voix se fit tremblante et il me chuchota « Je resterais avec toi cette nuit mais demain tu seras libre… Je ne veux plus user de toi, ni te faire encore plus souffrir. Malheureusement je ne suis pas aussi généreux que ça. Je veux certes ton bien mais je suis aussi égoïste. Pour cette nuit appartiens-moi, lorsque le ciel revêtira sa robe de jour, tu oublieras tout, moi et ce clan… Plus rien ne t’arriveras, je te le promets. »
Je m’agrippais à lui sentant mon cœur se serrer et lui dit « Je ne veux pas être loin de toi ne me laisses pas ! Je resterais avec toi cette nuit, demain et pour toujours Mizu… Tu es le seul à m’avoir comprise je ne veux pas… perdre le seul être qui me fait oublier ma solitude. Tu m’avais promis de rester!! Tu pensais en mal à cette époque mais tu me l’avais jurée… Je ne veux rien oublier, tu n’en as pas le droit. »
Il me sourit et je ne pus m’empêcher de passer lentement ma main dans ses cheveux noirs avant de caresser son visage… Je lui avais toujours fait tant de mal… Celle que j’étais n’avait surement pas fait mieux que cette femme que je représentais aujourd’hui, la femme qui l’avait maudit c’était moi… Je ne l’avais jamais aimé, je m’étais servie de lui. J’avais voulu prendre le contrôle des empires de ce monde parallèle où je vivais avant, mais voyant que ce que je faisais n’était pas juste Mizu avait surpassé son amour pour le bien de son peuple et m’avait tué. Sa tristesse fut si grande qu’il se maudit lui-même… Mais en réalité sa souffrance, cette cruauté, cela avait toujours été moi qui en était à l’origine. Mais la Akito que je suis, l’aimait vraiment, je l’aimais tellement. Je ne voulais pas oublier son image, son toucher.
Ses lèvres sur mon cou me firent frissonner et je caressais ses cheveux, sentant mon kimono glisser sur ma peau alors que le siens était entrouvert et laissait à découvert sa peau blanche et son torse finement musclé. Je sentis des rougeurs sur mes joues et pu tant bien que mal prononcer ces mots, en lâchant quelques soupirs, tandis que son souffle caressait ma peau et que sa main douce et sournoise en faisant de même. « Gomen Mizu… Gomen… » Si seulement je pouvais l’apaiser… « Akito oublions tout, laissons tout derrière nous parce que j’ai besoin de toi » Il avait besoin…de moi ? Malgré tout ce que je lui avais fait il était tombé amoureux de celle qui représentait et ressemblait à la femme qui l’avait tant de siècles fait souffrir. Son toucher était brûlant… Je le désirais et souhaitais que le ciel porte toujours sa robe de nuit, pour que ce moment dure éternellement, pour ne jamais oublier, pour ne jamais le perdre…