Kahla Raulin ~

Kahla est violente. Elle est à mille lieux de la jeune femme sage et effacée, douce et attentionnée, qui font toutes les facettes du stéréotype de la femme parfaite. Elle se bat, jure, hurle, rit bruyamment et fais des blagues salaces. Un garçon manqué. Au premier abord en tout cas. Cependant Kahla n’a pas oublié qu’elle était une femme et même si elle a grandit entourée d’hommes et qu’aujourd’hui, elle stresse de se retrouver avec des femmes trop délicates, elle reste féminine. Au moins un peu..

Disons simplement que l’aspect féminin de sa personnalité ne s’est jamais totalement développé. Elle est consciente de son corps, de ses courbes, de son visage fin, de sa corpulence plus faible que celle d’un homme. A vrai dire, elle a passé une bonne partie de son adolescence à se maudire d’être née fille, enviant la force plus innée des hommes. Puis elle a grandit, elle a apprit qu’elle pouvait devenir aussi forte qu’un homme en jouant avec ses propres atouts.

Enfin, l’univers des hommes lui correspond tout de même mieux. Kahla est une bonne camarade, autant avec une arme, qu’avec un verre à la main. Elle ne laissera jamais un collègue en arrière, c’est une femme d’honneur. Elle ne rechigne pas à la tâche et ne cesse jamais de s’entrainer. Elle est aussi très fière et facile à mettre en colère, ce qu’on pu remarquer certains de ses collègues qui ont eu tôt fait de ne plus la taquiner.. Enfin, pour les plus raisonnables. Kahla est tout à fait capable de vous sauter à la gorge en pleine rue si vous avez le malheur de lui chercher des ennuis. Elle tente cependant de se discipliner, ayant déjà reçu plusieurs avertissements de ses supérieurs n’aimant guère qu’un de leur soldat fasse parler de lui dans des affaires de règlement de compte à la sortie des bars.

Cependant, Kahla sait parfaitement se maîtriser lorsqu’elle est en mission. Elle a toujours été un élément fiable et compétent dans sa division. C’est un soldat exemplaire, qui se contente de suivre les ordres à la lettre et de protéger les membres de son unité afin qu’ils rentrent tous à la maison.

Lorsqu’elle est seule, elle repense parfois à son passé, aux maigres bribes qu’il lui en reste, à sa mère, au désert. Un étrange nostalgie s’empare alors d’elle, un sentiment de détresse qu’elle déteste au plus haut point. Elle ne montre que rarement cette facette plus fragile d’elle-même, de peur sans doute qu’on prenne cela pour un aveu de faiblesse.

Un corps souple, athlétique, apte au combat. Voilà les seuls éléments importants du physique de la jeune femme, tout du moins à ses yeux. Elle aime son corps, comme elle aimerait une lame qu’elle aurait elle-même forgée pendant des années. C’est une arme efficace qui ne la trahit pas, elle l’entretient, l’entraine, en échange de quoi elle attend des performances exemplaires. Une sorte d’échange de bons procédés. Évidemment, cette vision très fonctionnelle de voir son corps comme un objet à ses limites.

Dès qu’on vient la frôler ou la toucher de façon plus charnelle, essayant de s’adresser à son âme à travers son corps, elle déraille. Le plus souvent violemment. Sans doute une des raisons pour lesquelles elle n’a pas d’amant. On peut la toucher, pour tâter ses muscles d’acier oui, pas pour autre chose. Elle ne parvint pas vraiment a s’expliquer ce phénomène, elle n’est juste pas à l’aise qu’on la regarde autrement que comme un soldat ou un camarade.

Évidemment, outre son corps sculpté avec finesse, on ne manquera pas de remarquer sa longue chevelure rousse, qu’elle attache parfois en deux chignons pour ne pas être dérangée. Ses yeux sont bleus bien qu’ils tirent parfois sur le vert ou sur le violet suivant la luminosité. Kahla à la démarche assurée d’une femme qui sait ce qu’elle veut et des manières plutôt masculine. Elle n’est pas très féminine ni dans sa manière de parler, ni dans sa manière de s’assoir, le plus souvent en tailleur.

Kahla aime la simplicité et l'efficacité, il en va de même pour sa tenue vestimentaire. Elle porte le plus souvent un haut court et une jupe fendue lui permettant de toujours se mouvoir comme elle l'entend tout en cachant parfois certains objets attachés à ses cuisses. Elle ne porte pas toujours d'arme sur elle mais, elle est très douée pour le combat à mains nues et peut se battre avec n'importe quel objet du quotidien.

- Kahla.. Kahla..

Ces mots se répètent, doux, apaisants. Suivis d’une caresse sur sa tête, d’un baiser sur son front et d’une étreinte. Elle peut voir le ciel, noir, à peine grignoté par l’arrondis des dunes et ses fils d’or qui flottent dans les airs.

- Kahla.. Tu dois marcher seule maintenant. Continue. Ne te retourne pas.

La voix est calme mais l’urgence est bien présente. Sa gorge se serre, elle commence à trembler, gagnée par l’anxiété, son petit corps sanglote sans même comprendre pourquoi.

- Kahla, tout ira bien. Je veillerai sur toi. Tu dois être forte. C’est ton épreuve. Tu te souviens ? L’épreuve des adultes. Va. Maintenant. Tu dois marcher seule.

La voix s’éloigne, sa silhouette aussi. Elle disparait derrière les dunes. Elle disparait dans son dos alors qu’elle marche, à travers le désert immense. Seule.

Deux jours plus tard, elle s’effondrerait. À bout de force et déshydratée elle serait secouru par un homme d’Arcadia. Lorsque l’enfant se réveilla finalement, elle était dans un lit confortable bien que modeste et .. il y avait quelqu’un à côté d’elle. Pas un homme, pas encore à vrai dire, c’était un enfant, âgé de huit ans, soit deux ans de plus qu’elle. Le jeune garçon s’appelait Shotaro et était le fils de l’homme qui l’avait ramenée du désert, il était animé des meilleures intentions du monde mais.. cela ne sembla pas vraiment plaire à la gamine de le trouver endormi à côté d’elle.

Quand, alerté par le bruit, l’homme entra dans la chambre, il trouva son fils par terre et la gamine debout sur le lit, visiblement prête à en découdre. S’esclaffant, l’homme stoppa le début de bagarre et les mena à table.

Il s’appelait Hakurei Raulin et n’était qu’un simple attisant travaillant forgeron, il vivait modestement mais subvenait aux besoins de son fils. Ils vivaient seuls. La gamine comprit que la mère de Shotaro était morte peu après sa naissance. S’étant présentés, ils lui demandèrent son nom. D’abord mutique, l’enfant finit par lâcher « Kahla ». C’est en fait le seul mot qu’elle prononça ce jour là, les dix qui suivirent elle resta silencieuse. Il n’y avait qu’un seul lit dans la petite maison, elle dormait donc avec Shotaro, Hakurei dormant sur le sol. Elle du se faire à la présence du garçon et à la vie avec cette nouvelle famille.

C’est Shotaro qui finit par briser le silence dans lequel s’était enfermée la jeune fille, en la faisant hurlée de rage certes, et en se prenant des coups, certes aussi. Mais après cela, Kahla se remit à parler. Elle s’ouvrit au monde et intégra pleinement sa nouvelle vie. Elle pleurait souvent le soir, faisait des crises de panique incontrôlables, seulement rassurée par la présence de Shotaro qui ne la lâchait jamais. Elle trouvait cela agaçant et rassurant à la fois. Finalement, elle cessa de pleurer et les souvenirs douloureux devinrent plus flous. Elle entra à l’école, Hakurei l’inscrit à son nom et il subvint à ses besoins. Elle devint sa fille sans qu’il n’y ait besoin de mot. Par extension, elle devint la soeur de Shotaro qui loin de prendre un rôle de grand frère protecteur ne se fit que plus taquin envers elle.

Ils se battaient souvent, à la maison, à l’école, dans la rue. Kahla était douée en quelque sorte, autodidacte du combat de rue, transformant la moindre ombrelle, le moindre pot de fleur, en arme redoutable. Les maîtres et adultes disputaient fréquemment les deux enfants mais, Hakurei lui, riait. Il n’était jamais en colère, jamais violent. Certains critiquaient ouvertement sa façon d’éduquer ses enfants mais, il subvenait correctement à leurs besoins et ils étaient toujours en bonne santé, même couverts de bleus et de griffures. Il était fier d’eux, le jour où ils décidèrent d’intégrer les rangs des Guardians aussi.

Au final, même si Kahla pestait, Shotaro et elle finissaient toujours par se retrouver ensemble. Shotaro ne manqua pas une occasion de lui rappeler qu’il était l’ainé et que donc, il était en avance sur elle. Ce qui agaça tellement Kahla qu’elle sauta deux classes dans sa scolarité, rien que pour le plaisir de lui prouver qu’il n’était en rien supérieur à elle. Evidemment, il était fort probable qu’en faisant cela elle jouait le jeu de Shotaro qui ne semblait pas se lasser de l’avoir au plus près pour trouver de nouvelles façons de la mettre hors d’elle.


Leurs querelles étaient devenues si connues que lorsqu’ils purent intégrer une division, après avoir traversé avec brio l’école militaire, leurs supérieurs les mirent dans deux unités différentes. Ils pensaient sans doute qu’ainsi ils feraient moins de vague. Mais si Shotaro était effectivement plus calme sans sa petite soeur, Kahla elle n’avait besoin de personne pour trouver les ennuis. Le jour de son intégration, elle fit la rencontre de deux hommes. Le premier avait une tête de premier de la classe et critiqua sa tenue. Le deuxième avait des cheveux hirsutes et un regard enjôleur, il essaya de la draguer en l’appelant « jolie minette ». Les deux eurent le nez cassé.

A la suite de ce petit incident, chacun fit preuve d’un peu plus de prudence pendant quelques jours. Le premier de la classe était en réalité un fin stratège, il provenait d’une famille noble mais c’était engagé en tant que simple soldat, il souhaitait réellement faire ses preuves. La « tête d’hérisson » comme l’appela désormais Kahla, n’était pas l’homme le plus malin du monde mais il était vaillant et sa bêtise n’avait d’égal que sa générosité. Les trois jeunes gens finir par naturellement s’apprécier et former un trio très efficace en mission. En parallèle, la rivalité entre Shotaro et Kahla n’avait pas cessé, ils s’affrontaient toujours souvent et c’était encore à qui sera le plus fort, le plus rapide, le plus intelligent pour surpasser l’autre.

Cependant, lorsque Hakurei tomba malade, ils étaient tout deux là pour lui, oubliant toutes leurs querelles. C’était à eux désormais, de subvenir aux besoins de leur père. Kahla lui devait la vie, cette vie dont elle était fier aujourd’hui, elle lui devait ses compagnons d’armes et même ce frère insupportable. Elle n’était plus la petite fille perdue dans le désert, elle était un soldat, une femme forte et fier. Elle comprit que son épreuve pour devenir adulte, n’était pas encore terminée.